2007-2008 : découverte de l'Afrique |
Casamance 2 _ avril 2008 |
Arrivés à Zig, on a mouillé face à l'hôtel KANDIANOUMAN, ce qui nous a permis d'une part d'avoir un accès facile à l'eau et d'autre part le WIFI gratuit (même depuis le bateau!). Le mouillage est très sympa, surtout quand on sait que l'on est dans une ville de plus de 200 000 habitants. Mouillage de Ziguinchor L'eau est trouble donc on se baigne seulement pour l'hygiène. Pour la farniente (chose qu'on aura pas fait une seule fois), on peut utiliser la piscine de l'hôtel. La ville est gigantesque : le centre bétonné laisse rapidement la place aux souks et aux baraques en tôle. Le commerce est partout, c'est le poumon de la vie sénégalaise. La vie grouille, ça bataille, ça négocie, ça insiste, ça marchande, ça pinaille, bref c'est totalement délirant. On est pas souvent tranquille, et si au début c'est amusant je peux vous garantir qu'à la fin de la journée vous êtes épuisés! Mais bon, les gens sont tellement sympas qu'on entre vite dans le jeu. Voici un exemple de technique de vente qu'on devrait enseigner aux BTS « Force de Vente » : Technique féminine : « Bonjour! Comment ça va? Ca va? Tu t'appelles comment? Et sinon ça va? T'es magnifique! T'es très belle! Tiens viens voir ce que j'ai! Tiens prends ça c'est cadeau!Je te l'offre parce que ça me fait plaisir! Ah me dis pas non! Tu ne veux pas me vexer quand même??!!! » Et patati et patata. Le truc c'est qu'IL NE FAUT JAMAIS ACCEPTER UN CADEAU car le lendemain elle revient à la charge, te rappelles qu'elle t'as offert quelque chose et que tu dois lui rendre la pareille en lui achetant un truc.... La petite maligne! Technique masculine : voir plus bas = marché artisanal de Ziguinchor Les 3 premiers jours, on a lavé le bateau, fait le plein des courses (un peu tous les jours, ce qui rythmait nos journées), visité la ville, rencontré ses habitants, dégusté (euh empiffré plutôt...) les bonnes crevettes de Zig...etc. Le côté moins drôle du moment était que nous étions en pleine pénurie d'essence. Ce qui a empêché les sénégalais de travailler, ce qui a fait augmenté les prix des produits frais comme le poisson ou les fruits et ce qui a finalement fait monter la tension partout dans le pays. On a assisté à un attroupement terrible, triste et pathétique devant la seule station d'essence qui a été livrée. Les gens ont dû jouer des coudes pour réussir à acheter quelques litres du précieux or noir. Dur, dur... On a aussi pu assister à la fête de l'Indépendance : après ½ heure de marche sous un soleil brûlant, on a attéri au milieu d'une immense foule en liesse encourageant les militaires et associations en tout genre qui défilaient. La foule était si dense qu'on a quasiment rien vu, mais on est resté là à apprécier l'ambiance. Bertrand est arrivé par avion le 05 avril. On a profité de notre passage à l'aéroport pour faire notre entrée au Sénégal et tamponner nos passeports par la seule personne habilitée de la ville : Mr Barthélémy en personne, avec qui on doit prendre rendez-vous à l'avance bien sûr. Le lendemain, nous avons quitté Zig à 06h30, direction l'île de Karabane. Le fleuve Casamance fonctionne comme la Garonne : il faut jouer avec la marée et pister les bouées. A 08h30, nous avons fait un 1er stop pour attendre la marée et à 13h30 on était reparti. Nous sommes arrivés sur l'île vers 19h. Mais le vent nous a empêché de mouiller face au village de Karabane, nous avons donc filé dans le boolong de Djiembering pour se mettre dans un fabuleux mouillage à ¼ d'heure de marche du village de Kachouane. Mouillage de Kachouane C'est à mes yeux le stop le plus sympa de notre voyage. Nous avons passé la journée à nous balader dans le village sur les pas d'Ibrahim, notre guide improvisé. Le village est très charmant, bien entretenu avec de jolies « cases » aux parcelles délimitées par de belles clôtures diola. Case à Kachouane Il y a beaucoup de puits (créés par les Arabes le plus souvent) et donc de cultures de fruits et légumes. Cultures à Kachouane Les habitants sont chrétiens ou musulmans mais surtout animistes. Ibrahim nous a beaucoup appris sur les us et coutumes du village : par exemple l'organisation des réunions (par âge, sexe, caste), des dispensaires, de l'école, des cultures (ce sont toujours les femmes qui bossent!!), de la récolte du vin de palme, des puits...etc. On a mangé nos premières huîtres de palétuviers et le meilleur yassa de poisson du voyage! Huîtres de paléthuviers Je garde un souvenir ému des personnes hautes en couleur qui nous ont accueilli : Ibrahim (notre guide, cultivé, intéressant et disponible), son père ( avec son humour décapant, il a même réussi a fermer le clapet de Pierre!!), Belle (la boulangère à gros ...caractère!), Jean (chasseur de brousse qui pétarade au vin de palme), Pierre et Antoine (2 récolteurs alcoolos de vin de palme), Simon (ex-champion de lutte et tenancier du bar resto « Simon & frères » qui vous promet que chez lui « vous serez nourris, logés, noircis! ») et Doudou et Ferdinand, ses deux adorables frères. "Belle" Récolteurs de vin de palme Resto "Chez Simon" Le jour suivant, nous sommes partis mouiller au village d'Ehidj. C'est un village : qui ne garde pas ses morts, sacré et composé de beaucoup de fétichistes, où tous les habitants appartiennent à la même famille « Soumaré » !! Le mouillage est idyllique et c'est ici que Bertrand prendra son premier cours de pêche au filet avec Léon et Joël. Leçon de pêche Mouillage d'Ehidj Le lendemain, journée de touristes. Nous avons laissé le bateau au mouillage de Katakalousse et avons pris un taxi pour Cap Skirring, haut lieu des toubabs en vacances au Club Med. Vendeur ambulant Plage Cap Skirring Après une baignade dans l'Atlantique, nous avons fait un rapide tour au marché artisanal, histoire de se rappeler à quel point les toubabs sont sollicités par les marchands. Bref, une ville qui ne vaut pas le détour. Le matin suivant, nous avons visité tranquillement le village de Karabane, ancienne capitale marchande de la Casamance du temps où les français essayaient encore de dominer et exploiter cette région du Sénégal. On y voit encore des vestiges de cette époque : ruines bétonnées, église bretonne, tombe du capitaine Portet??? Le village est très joli, les « cases » sont fabriquées en feuilles de roniers, les plages au sable blanc longées de palmiers et les commerces rivalisent d'humour décalé. Karabane Pub de couturier Pub d'un commerçant A 11h, nous sommes partis avec la marée direction Nioumoune. C'est le plus grand village que nous ayons visité. Il compte 3500 habitants répartis sur quatre quartiers, plus un (celui du presbytère). Ici les maisons sont en terre, les toits en feuilles de roniers pour les plus pauvres et en tôle pour les plus riches. Ils n'ont pas de puits car l'eau est saumâtre, ce qui signifie aucune culture (à l'exception de celle du riz bien sûr). Le village est très pauvre et la vie y est très rudimentaire. Cases à Nioumoune Nous y avons passé 4 jours fabuleux : visite des 4 quartiers et du village d'Itou, discussion sans fin avec les villageois (Kassoumaï? Kassoumaï kepp/barré! Boutikané? Kassoumaï ! Kandia-Ibou? Sigrid! Et toi, kandia Ibou?..etc – traduction : bonjour! Comment ça va? Ca va, et toi comment ça va? Ça va! Comment tu t'appelles? Et ça dure des heures comme ça, c'est génial!), balades le long des rizières, dans la forêt, sur des étendues de sable fin, traversée de boolong en pirogue...D'ailleurs, cette traversée c'est un peu l'histoire de la chèvre, du chou et du loup : un boolong sépare Itou du village de Nioumoune. Donc pour traverser, ils ont laissé 2 pirogues à disposition des passants. Le problème c'est que : 1.il n'y a pas de rames, donc si tu n'as pas pensé à emmener la tienne, soit tu fais demi-tour, soit tu attends l'arrivée d'un prochain passant 2.souvent les 2 pirogues se retrouvent du même côté du boolong, donc t'as plus qu'à attendre l'arrivée probable d'une autre personne. C'était assez pittoresque ! Traversée en pirogue Un samedi, les habitants des 4 quartiers se sont retrouvés pour la construction de classes supplémentaires pour l'école. A 09h30, le bombolong (gros tambour servant de cloche de rassemblement) a retenti dans tout Nioumoune pour réunir tout le monde au centre du village. Ensuite, tous et toutes sont partis en rang, tels des milliers de fourmis ouvrières, vers une colline de coquillages à l'extérieur du village. Les fourmis de Nioumoune Les hommes creusaient et remplissaient les seaux de coquillages. Les femmes les transportaient sur leur tête le long des rizières jusqu'à l'école et les anciens supervisaient tout ça à l'ombre en se soignant au vin de palme. Les hommes Les femmes ...et les anciens Pierre et Bertrand ont également fait 2 aller-retours avec les femmes, histoire de donner un coup de main. Ils ont été largement remercies au vin de palme à la fin de la matinée par les anciens, les rois féticheurs, les chefs de quartiers et les travailleurs. Pierre et Bertrand au travail Vient le temps de la récompense Le dernier jour, une fête avait été organisée par le village pour inauguer une pirogue offerte à Nioumoune par une association de Cheyres (Suisse). Nous avons assisté à toute l'effervescence pré-fête : tôt le matin, un bœuf a été sacrifié (ce qui avait entraîné une grande agitation chez ses congénères qui ont hurlé à la mort et tenté de se suicider dans le boolong pendant une bonne heure) les femmes ont cuisiné dans la cour de la maison du chef de quartier, les hommes ont brassé du vent (typique !). Les femmes au fourneau Vers 11h, plusieurs femmes se sont parées de leur habit traditionnel et les hommes importants sont grimpés avec elle sur la nouvelle pirogue pour partir à la rencontre des Suisses sur le boolong. Bertrand et moi les avons accompagnés et ça a été une sacrée fête sur la pirogue : musique, chant, danse ! Arrivée de la nouvelle pirogue A l'arrivée des Suisses, tout le village les a célébrés : discours du chef de village, discours des Suisses, discours de Maurice (qui en a profité pour y glisser quelques requêtes supplémentaires comme un groupe électrogène, une citerne et des ordis pour l'école), danses traditionnelles et grand repas!! Auquel nous avons bien sûr été invités pour nous remercier d'avoir sauvé la pirogue de Nioumoune la semaine passée! Seuls les toubabs, les instits, les chefs de quartier et les quatre « hôtesses » locales accompagnant les Suisses ont été conviés. Une fois le repas terminé, un deuxième repas plus simple a été servi pour le reste des villageois. Danse traditionnelle Requêtes et discours Reines féticheuses En fin d'après midi, nous sommes partis pour Djilapao. C'est un petit village de 50 habitants et de 37 maisons. Ici aussi, le manque d'eau est un vrai problème Ils ont développé une nouvelle activité, celle de l'accueil et du gardiennage des voiliers. La plupart des « voileux » y laissent leur bateau, qui se retrouve sous la responsabilité du village moyennant une petite contribution de 10 000 F CFA par mois. Pjuske à Djilapao Accueil des voiliers C'est donc ici que Pierre et Tove laisseront leur bateau une semaine plus tard. En attendant, nous avons visité le village et sa case à deux étages (oui oui !) et fait la rencontre de Désiré (chef), Donantine (sa femme) et Ernestine (épicière en chef et femme débrouillarde). Nous avons terminé notre séjour (enfin celui de Bertrand) par le village d'Affiniam. L'arrivée en bateau sur ce village est très sportive. Le passage même à marée haute est très étroit et bien entendu, nous avons touché! Nous sommes restés coincés (et un peu penchés...) pendant 15 bonnes minutes. Alors que 3 m plus loin, nous avions 5 m sous la quille! Affiniam est certainement le village le plus riche que nous ayons vu car ici l'eau est claire et donc les cultures de fruits et de légumes abondent. D'ailleurs, ils ont même un immense verger et un barrage fabriqué par les chinois. Affiniam Mouillage d'Affiniam Route en latérite Cultures à Affiniam On y a vu notre 1ère voiture depuis plus de 15 jours : la 4L du curé!! La 4L du curé ! C'est aussi le 1er village où le campement est encore communal, et il fonctionne très bien comme cela ! Pour l'anecdote, lorsque nous avons visité le verger, il y avait une grosse balance pour les légumes. On en a profité pour se peser, et on a bien cru que Pierre avait perdu 15kg !!!! Il était ravi, sauf que sa joie a été de courte durée : après vérification, la balance bloquait à 86 kg!! 16 avril, dernier jour de Bertrand. Nous avons passé la journée à Ziguinchor. Rue de Ziguinchor Tove, Bertrand et moi sommes partis au marché artisanal de Ziguinchor pour acheter nos cadeaux. Et là c'est la guerre ! Tous les vendeurs t'interpellent, te supplient de venir voir leur étal (« pour le plaisir, c'est tranquille ici! »)...tu parles ! Ils sont affreux ! Ils veulent tout te vendre et surtout ce que tu ne veux pas! Et là commence le jeu de la négociation : le vendeur t'annonce un prix exorbitant, toi tu t'offusques « c'est bien trop cher! ». Il va commencer à baisser le prix petit à petit « parce que c'est toi », « au nom de l'amitié », « parce que t'es le premier client de la journée et ça porte bonheur! »...Toi, tu continues à refuser et là c'est le moment où il te demande « quel est le prix minimum que tu veux mettre RAISONNABLEMENT? ». Ensuite, c'est à son tour de s'offusquer à l'annonce de ton prix : « A ce prix là, je ne gagne pas d'argent ! Il faut nous faire vivre » Et patati et patata. Jusqu'au moment où tu t'en vas. Et là le vendeur te rattrape et vous concluez la vente! Et ici aussi il y a une technique : il s'agit de baisser les yeux ou regarder ailleurs l'air mécontent mais contraint, et dire « vas-y, vas-y, donne l'argent, donne! ». Il ne faut pas se fier à cette attitude car quelques secondes plus tard, le vendeur est si ravi d'avoir fait sa vente qu'il t'offre des tas de cadeaux, te tape sur l'épaule et te remercie! EREINTANT mais formateur! Le lendemain matin nous avons visité le quartier de Boucote, sorte d'immense souk. Ça grouille de monde, ça sent très fort les épices, le poisson et la transpiration, et ça devient vite irrespirable. Mais c'est à voir! Marché de Boucote L'après midi, nous avons emmené Bertrand à l'aéroport...vide...Trois mecs assis autour d'une bière nous ont informé que l'avion ne viendrait pas!! Normal!! C'est l'Afrique ! C'est donc dans l'urgence que nous sommes allés à la gare routière pour essayer de lui trouver un taxi brousse pour l'emmener à Dakar. On a débarqué dans un capharnaüm de voitures plus pourries les unes que les autres, de camions 4x4 surchargés et de mecs surexcités. Après de longues négociations (à la sénégalaise, donc je vous laisse imaginer!), et un retour en centre ville, Bertrand est finalement reparti accompagné de 2 sénégalais de notre âge (Moussa et Thierno) pour essayer de négocier un taxi brousse à 3. Pari réussi, ½ heure après ils étaient en route pour Dakar. Ils ont traversé le Sénégal du Sud au Nord en passant par la Gambie. L'aventure a été sportive ! Mais ses 2 compagnons se sont bien occupés de lui et lui ont offert une bonne douche et un thé corsé à l'arrivée avant de l'emmener à l'aéroport de Dakar. La dernière semaine a été occupée à nettoyer le bateau à Ziguinchor, le ramener à Djilapao et le préparer à l'abandon : nettoyage des cales, dépoussiérage des coussins, rangement, ponçage et vernissage des parquets...etc. Pierre au boulot Enfin tout ça, nous le faisions le matin et en fin de journée, car la chaleur nous forçait à...dormir le reste du temps. Le soir, nous avons passé quelques soirées avec Christian, Marie-Pierre et Maxence, une famille qui voyage sur un beau catamaran et dont nous allons certainement recroiser le chemin au Brézil l'année prochaine. En l'absence de Pierre et Tove, c'est Jules César qui surveille le Pjuske et l'aère. Jules César nous a trouvé un emplacement contre la mangrove : une ancre à l'avant, une ancre à l'arrière, deux bouts reliés à la mangrove. A marée basse, la quille du Pjuske s' enfonce un peu dans la vase, mais tout est OK. La mangrove est très proche! Jules César, capitaine en intérim A très bientôt mon beau bateau! Le 23 avril à 15h30, nous avons quitté le cœur lourd Djilapao et le Pjuske. Le voyage jusqu'à Ziguinchor s'est fait en pirogue sous un soleil torride. Arrivés à Ziguinchor, nous avons passé l'après midi avec Yves et Julie, un couple déjà rencontré quelques mois plus tôt. Nous avons dormi à l'hôtel « Perroquet » et le lendemain matin j'ai pris un cours de préparation de riz « à la sénégalaise » dans un resto!! oui oui ! L'après midi nous avons embarqué sur le ferry flambant neuf « Aline Sitoé Diatta », remplaçant du « Joola » qui avait sombré dans les eaux gambiennes en 2002 faisant plus de morts que le Titanic...Ca ne vous dit rien???!!! C'est bien ça qui est triste ! Pour finir, nous avons passé 2 jours à Dakar chez Dominique et Jean Michel Bergès que nous remercions encore une fois pour leur accueil! Voilà! Et depuis Pierre et Tove reprennent leurs kilos perdus en enchaînant grosses bouffes et fiestas en France alors que le Pjuske survit seul et abandonné au fin fond du Sénégal ! Retour prévu début octobre ! |